Guérie
Fini le petit pincement au coeur en croisant un joli ventre rond dans la rue.
Envolé le bide qui se tord à l'annonce de la grande nouvelle chez des copains.
Effacée cette vilaine petite pointe de jalousie en apprenant l'existence d'une nouvelle vie.
Disparue cette envie de donner la vie.
Depuis l'arrivée de Sweet A., je me sens rassasiée.
Pleine de mes enfants, ivre de leurs mamans répétés inlassablement, droguée des gestes quotidiens mille fois répétés, repue de leurs câlins et gestes affectueux.
Ce sentiment d'être incomplète, qui ne m'a pas quitté après l'arrivée de Little B., a enfin décidé d'aller voir ailleurs.
Aujourd'hui je suis guérie.
Guérie de mon envie d'enfant, guérie de cette main que j'aimais tant passer sur mon ventre rond, guérie de ces petits coups que je ne ressentirai plus jamais au plus profond de moi, guérie de ce besoin d'enfouir mon nez dans le cou de mes tout-petits, guérie de ces nourrissons qui ont tant besoin de moi, guérie de mes allaitements les yeux dans les yeux, leur petite main agrippée à mon tee-shirt, guérie de la douleur et du bonheur de mes accouchements, guérie de cette bouffée de bonheur qui m'emporte quand je n'étais encore pour eux que l'unique, la seule, l'essentielle.
Aujourd'hui je suis comblée.
Une naissance il y a une semaine, un bébé d'un mois dans les bras ce matin, l'annonce d'un petit 4ème chez des copains ce midi et d'un numéro 3 chez d'autres ce soir, et rien.
Rien si ce n'est de la joie, des sourires, de l'attendrissement et une prise de conscience que tout ça n'est plus vraiment pour moi.
Je me suis longtemps demandée si cette envie d'enfant me quitterait un jour.
J'aime et j'aimerais les bébés et les enfants toute ma vie, mais je suis passée à autre chose.
Je trie et vends les vêtements de Sweet A, Mister E et Little B. Idem avec leurs jouets. Je n'ai plus ce besoin de garder "au cas où".
Le "au cas où" je n'en veux plus. Je suis complète. Je me sens remplie. L'incompréhensible auparavant "c'est bien chez les autres" que ma soeur nous répétait en boucle quand on la taquinait sur un petit dernier est devenu mien aujourd'hui quand on me titille sur le numéro 4.
Avec 2 enfants, je n'étais pas assez. Avec 3, je suis entière et je n'ai pas besoin de plus.
Une autre vie commence avec "mes grands". Un autre chapitre de ma vie démarre et j'ai hâte de découvrir la suite.