Un jour sombre
Il y a les anniversaires qui donnent le sourire et il y a ceux qui sont d'une tristesse infinie.
Il y a les anniversaires où tu sautes du lit ravie de cette nouvelle journée et il y a ceux où tu as envie de rester cacher sous la couette.
Il y a les anniversaires où tout le monde pense à toi et il y a ceux où personne ne t'appelle.
Je ne connaissais jusqu'à présent que les premiers, aujourd'hui je découvre les seconds.
Voilà déjà un an que je redoutais cette date.
Il y a quelques temps, une amie m'a demandé ce que j'avais envie de faire aujourd'hui. J'ai eu envie de lui répondre "rester au lit, pleurer sous mon oreiller et attendre le 12 septembre" mais finalement ça ne changerait rien.
Non rien, parce qu'on soit le 7, le 8, le 18 ou le 23, il n'y a pas une journée où je ne repense à ce 11 septembre 2016. Pas une journée où je ne me repasse pas le film de ce matin qui a changé mon regard sur la vie à tout jamais.
Impossible d'oublier cette douleur que je ne connaissais pas avant et avec laquelle je vis tous les jours.
On a beau dire que perdre un grand-parent c'est difficile. Les miens sont partis depuis longtemps déjà et je connais cette peine. Mais perdre un de ses parents n'est en rien comparable. C'est un pilier, un bout de son enfance qui s'en va. Sans lui, on est bancal à tout jamais.
Et la tristesse s'installe, certains jours elle se cache profondément et on y pense à peine, et d'autres elle se réveille, insoutenable.
Il y a un an je perdais mon papa. MON PAPA. Cet être que tu vénères petite, celui qui court derrière toi quand tu apprends à faire du vélo sans roulettes, celui qui gronde, celui qui encourage, celui qui t'aide à faire des exercices de maths ou physique, celui qui t'apprend à conduire, celui avec qui tu remontes l'allée de l'église le jour de ton mariage, celui qui berce tes enfants, celui porte un regard bienveillant sur ta vie et qui est fier de toi.
Un an qu'il n'est plus là, un an que mon univers a changé. Un an de vide, un an de larmes.
Aujourd'hui, je ne sais pas quoi faire pour rendre ce jour un peu moins triste. Je vais lui apporter des fleurs, lui parler un peu de cette année sans lui.
Les tâches quotidiennes me sont insoutenables : débarrasser la table, m'occuper des enfants, ranger la maison, avancer sur ma to do list... tout ça m'est insupportable. Comment passer une journée normale aujourd'hui?
Est-ce que tous les 11 septembre seront désormais comme ça? Une parenthèse hors du temps, une journée où j'appuierais chaque année sur le bouton pause, 24h à pleurer un peu plus que d'habitude?
Aujourd'hui je ne sais pas quoi faire, je tourne en rond, incapable de penser à demain.
Je déteste cette journée et j'ai hâte qu'elle se finisse. Je n'ai pas envie d'en parler, je ne veux pas qu'on m'en parle.
Ces derniers jours étaient moroses, cette journée est pire que tout. Elle réveille tout ce que je pensais enfoui depuis des semaines et des mois. Je voudrais fermer les yeux et me réveiller en me disant que tout ça n'est qu'une mauvaise blague.
Mais c'est impossible. Il y a un an il me souriait une dernière fois. Il y a un an il me disait aurevoir.
Depuis un an, je suis toute seule.
Cet anniversaire là, je préférerais l'oublier.