J'ai lu mon 1er Goncourt
Depuis que j'ai ma Kindle, je dévore. J'avais oublié avec les enfants le goût de lire. Trop fatiguée, pas le temps de me poser... bref durant quasi 6 ans, je n'ai pas ouvert un livre.
Mais depuis l'année dernière et ce petit plaisir que je me suis fait, j'enchaine les bouquins. 2 ou 3 par mois, de la lecture légère, quelques polars, de jolies histoires d'amour, un peu de voyage, une touche d'histoire. Mes goûts sont assez variés. Je cherche juste un style fluide, facile à lire qui m'emporte.
En toute franchise, je me suis souvent dit "Les Goncourt, très peu pour moi". Les livres pour intellos branchouilles, ça n'est pas mon truc. M'arracher les cheveux pour comprendre une phrase de 6 lignes, non merci.
Je veux pouvoir lire aussi simplement que si je regardais une série ou un film. Sans prise de tête.
J'avais vaguement entendu parlé de Chanson douce de Leila Slimani, prix Goncourt 2016, sans vraiment me pencher sur l'histoire.
Dimanche soir, alors que je cherchais dans la boutique Amazon un nouveau livre à lire, on m'a proposé d'en télécharger un extrait gratuitement. Pourquoi pas? Au moins, je serai moins bête, j'aurai lu quelques pages d'un Goncourt!!!
En 10 minutes, j'avais littéralement dévoré les 2 chapitres que l'on m'avait gracieusement offerts. Le style était simple, concis, clair. L'histoire m'avait déjà emportée. Il ne restait plus qu'à me l'acheter.
Ce livre c'est l'histoire de Myriam, mère de deux jeunes enfants, qui décide malgré les réticences de son mari de reprendre son activité au sein d'un cabinet d'avocats. Le couple se met à la recherche d'une nounou. Après un casting sévère, ils engagent Louise, qui conquiert très vite l'affection des enfants et occupe progressivement une place centrale dans le foyer. Mais peu à peu le piège de la dépendance mutuelle va se refermer, jusqu'au drame.
Le livre commence fort. La scène inaugurale décrite dans le premier chapitre fait froid dans le dos. Je me suis d'ailleurs demandée si tout le livre était comme ça et si j'allais pouvoir continuer.
Mais très vite, l'auteur nous plonge dans un récit du quotidien de ce jeune couple de parisiens avec 2 enfants, avant le drame. On est happé par leur histoire banale de jeunes parents à la recherche d'une nounou, de la perle rare pour ses enfants et forcément on s'identifie.
Leur vie, c'est notre vie, ma vie. Tristement banale.
Tout au long du livre, Leila Slimani revient sur la genèse du drame. Elle raconte sobrement comment Louise, la nounou si parfaite aux airs de Mary Poppins, s'est faite une place au sein de cette famille tout en restant une étrangère, comment elle a su se rendre indispensable aux parents et aimée des enfants, comment en s'occupant de ces enfants elle comblait ses propres carences affectives.
Leila Slimani décrypte également le rôle des parents, tiraillés entre leurs vies professionnelles et leurs enfants, qui doivent aussi apprendre à être des patrons, à trouver la bonne distance, à prouver leur gratitude sans humilier, à faire preuve d'autorité sans blesser.
Au fil des pages, on comprend que ce qui pose problème c'est la place donnée par les parents et prise par la nounou : elle est indispensable mais sa présence n'est que temporaire. Elle est là pour combler le vide laissé par les parents, et son emprise sur cette famille s'accentue au fil des jours, des mois, mais tôt ou tard elle finira par les quitter et disparaitre de leur vie.
Ce qui m'a frappé tout au long de ma lecture, c'est le style dépouillé, sobre de l'auteur. Elle est sans parti pris, elle ne porte pas de jugements sur les personnages : ni sur les parents ni sur la nounou infanticide. Elle est neutre, sans sentiments : les faits, rien que les faits.
Je me suis surprise moi par contre à en avoir, à relever certaines choses, certains détails, que je n'aurai pas laissé passer, qui auraient du leur mettre la puce à l'oreille. Et puis très vite, j'ai réalisé que non, parce que finalement on ne pense jamais au pire.
Ce livre, je l'ai dévoré en 2 jours. Impossible de le lâcher malgré l'histoire terrible dans laquelle je me suis forcément projetée et dans laquelle tout parent peut s'identifier.
Myriam et Paul, ça aurait pu être nous, Mila et Adam, les kidswhatelse.
Ce drame psychologique, on l'aime ou on le déteste. Tout est dans la capacité à pouvoir ouvrir les yeux et prendre conscience de ce qui peut arriver.
Chanson douce est un livre dérangeant car il est totalement réaliste.
Moi j'ai adoré.