Nos étoiles ont filé
Je me souviens encore de la première fois où j'ai entendu le témoignage d'Anne-Marie Revol.
C'était un matin de septembre, au volant de ma voiture, sur le chemin du boulot, quelques jours à peine après la reprise de mon second congé maternité.
Ses mots, son histoire m'avaient alors figé sur place.
Aujourd'hui encore quand je l'écoute à nouveau, j'entends sa détresse, j'imagine cette boule qu'elle a au fond de la gorge, et je comprends son besoin de parler et de raconter ses filles.
Anne-Marie c'est cette maman qui a perdu ses 2 petites filles dans un incendie accidentel, en août 2008.
Pénélope et Paloma n'avaient que 26 et 14 mois. Des bébés.
Deux étoiles qui sont parties au ciel rejoindre des milliers d'autres.
A la sortie de son livre, Little B. n'avait que 4 mois et même si son témoignage m'avait bouleversé et que j'avais envie de découvrir son parcours, sa force pour surmonter et survivre face à cette épreuve qui lui avait été imposée par la vie, je ne m'en étais pas sentie capable.
Cet été, je n'ai lu qu'un livre.
Un seul et petit livre.
Mais certainement le plus beau depuis bien longtemps.
Oui cet été, j'ai senti que j'étais enfin prête à me plonger dans cette histoire si dure.
Mon entourage n'a pas compris pourquoi je m'accrochais tant à cette histoire.
Parce que je suis dingue, parce que je suis maso sûrement.
Parce que depuis toujours, j'ai toujours eu besoin d'imaginer le pire pour mieux vivre et apprécier le présent.
345 pages.
Un peu plus d'un an de lettres quotidiennes dans lesquelles Anne-Marie parle à ses filles, leur raconte sa détresse et celle de leur papa, leur tristesse de se retrouver à nouveau tous les 2 seuls, les situations ubuesques qu'elle rencontre, les réactions ahurissantes de certaines personnes, la douleur de vivre sans elles, son besoin d'avancer, de continuer sa famille en donnant à nouveau la vie.
Des lettres tristes, des lettres pleines d'amour, mais aussi des lettres gaies.
Elle leur parle pour maintenir le lien avec elles, pour éviter qu'elles ne s'éloignent un peu plus, pour les faire vivre encore et toujours.
Ses filles sont ses confidentes, les témoins des jours qui s'écoulent malgré leur absence.
Mon coeur de maman s'est serré des centaines de fois, mais pourtant je n'ai pas versé une larme.
J'ai englouti le livre en 2 jours, impossible de le quitter, de refermer cette histoire si touchante, si poignante.
Je n'ai pas compté les fois où je me suis sentie proche d'Anne-Marie, dans son quotidien de maman, dans ses réactions, dans son vécu (nous avons grandi dans la même ville), dans ces surnoms donnés à ses filles (mes soleils, mes Barbies girls, mes douceurs, mes tendres amours, mes gloutonnes, mes asticots...)... tous ces petits détails qui me rapprochaient un peu plus d'elle au cours de ma lecture.
Et puis il y a cette coincidence troublante, cette ironie du sort, ce lien qui fera que jamais je n'oublierais son histoire...
Je suis devenue maman pour la première fois le jour même où Anne-Marie enterrait ses filles et leur disait aurevoir.
Alors ce 16 août, à chaque anniversaire de Mister E., Pénélope et Paloma seront aussi dans mon coeur.
La lecture de ce livre m'a fait un bien fou.
J'appréhende désormais différemment mes relations avec Mister E. et Little B..
Je relativise.
Je me surprends à les serrer fort dans mes bras, à leur dire je t'aime plus que de raison.
Nos enfants sont là, vivants, en bonne santé.
Je ne pense pas avoir la force d'Anne-Marie pour surmonter un tel drame.
Son courage est admirable, sa façon de voir la vie est belle.
Grâce à elle, Pénélope et Paloma existent à tout jamais.
Ses mots sont justes.
Ses mots sont tristes.
Mais ses mots sont beaux.
Je suis consciente que lire un tel livre est difficile.
Tout le monde n'est pas prêt à affronter un tel drame.
Il ne relève absolument pas de voyeurisme, c'est tout simplement un hommage sincère d'une maman à ses 2 petites filles.
Attendez le temps qu'il faut pour être prête, mais lisez-le.
Pour vous, pour vos enfants, pour Anne-Marie et pour elles.
"Le bonheur est une chose fragile dont il faut profiter sans compter. La vie est monstrueuse."
Anne-Marie Revol - Nos étoiles ont filé