L'ambivalence des sentiments
Je n'ai quasiment rien raté de ses presque 13 mois.
24h sur 24h, 7 jours sur 7, j'ai toujours été là pour elle, plus encore que pour ses frères au même âge.
Je décrypte chacun de ces gestes, chacune de ses attentions, ses petits habillements, ses colères. Je la traduis dans un claquement de doigt. Je la connais pas coeur.
J'aime quand elle me regarde pour me demander mon assentiment quand quelqu'un lui parle.
J'aime quand elle me décoche un de ses grands sourires coquins.
J'aime la serrer dans mes bras après ses courtes siestes.
Je l'aime un peu moins quand la nuit, elle nous fait la java.
J'aime la voir galoper à 4 pattes et se déplacer le long du canapé.
J'aime la voir jeter la tête en arrière, fermer les yeux et ouvrir grand la bouche en attendant la cuillère.
Je sais quand elle est fatiguée, quand elle a faim, quand elle veut jouer, quand elle a besoin d'un câlin.
Elle et moi. Moi et Elle.
Quasi 13 mois que nous ne faisions qu'une.
Hier, j'ai reçu la fameuse enveloppe de la mairie.
Celle qui dit qu'il n'y a pas de place pour l'accueillir en crèche.
Mais cette fois-ci, c'était une autre histoire que l'on nous racontait. Nos efforts avaient payé.
Sweet A. aura une place 3 jours par semaine dès novembre dans une nouvelle structure.
Le temps s'est arrêté mais pas mes pensées.
Mon coeur s'est fendu en 2 : crier de joie d'avoir enfin obtenu le graal au bout de 3 enfants ou pleurer à l'idée d'être séparée?
Heureuse de retrouver du temps pour moi.
Terrorisée à l'idée de la quitter.
Heureuse qu'elle quitte mon giron pour découvrir la vie avec d'autres.
Terrorisée de réaliser que pour moi c'est une nouvelle vie qui commence, avec le retour au travail.
Depuis hier, je ris, je pleure, je la serre un peu plus fort dans mes bras, la regarde un peu plus au fond des yeux, je lui répète en boucle que je l'aime.
Je vais devoir la partager un peu, lui lâcher la main.
A elle de prendre son envol, de se créer sa petite vie sans moi. C'est normal, c'est la suite logique, il faut juste que je m'habitue à l'idée.
Je l'ai tellement voulu cette place sans trop oser y croire, maintenant qu'elle est là, c'est le signe d'un grand changement dans notre petite vie confortable.
Mais j'ai peur. Pour elle, pour moi, pour nous.
Je suis terrorisée à l'idée de tout ce que cela va chambouler.